Dans le secteur de l’Oxature, tout au bout du Grand Méridien de la Vire existe un système de trois planètes dont l’une abrite une civilisation NT 2, les Hoplotes. Elle tire son nom de sa planète natale, elle-même nommée Hoplos.
La civilisation Hoplote est constituée d’un ensemble de races intelligentes quadrupèdes d’origine reptilienne. D’une longueur moyenne d’un mètre trente sur une hauteur de soixante-quinze centimètres, ils communiquent par le toucher au travers de vibrations qu’ils propagent dans le sol. Ce sont d’excellents mineurs et leurs cités sont en partie souterraines, en partie aériennes avec de grandes tours construites en se servant des roches excavées des sections enfouies de leurs habitats.
Sur Hoplos, ils sont regroupés sur un seul des trois continents, dans des régions proches de l’un des pôles.
On compte un peu moins de 666 000 individus. Ils sont sexuellement non différenciés et se reproduisent par fission binaire. Lorsqu’ils atteignent la maturité nécessaire ils gonflent littéralement jusqu’à ressembler à une espèce de cocon. Leur peau durcie et à l’intérieur du corps même de l’Hoplote se développe un second individu en tout point identique à son géniteur. Abrité dans un premier temps au sein d’une matrice abdominale l’embryon migre ensuite vers l’extérieur du corps parent, entre la cuticule du cocon et sa peau. Bientôt deux individus cohabitent dans cette matrice qui va éclore et les libérer. Ils sont en tout point identiques et le « nouveau-né » détient la totalité des souvenirs de son parent. Seules les blessures physiques et les éventuelles cicatrices et handicaps sont gommés. L’être neuf est adulte et ne vieillira pas. Les Hoplotes n’ont pas véritablement d’âge. Leur biologie les met à l’abri de la dégénérescence cellulaire. Ils ne meurent que de causes accidentelles. Mais là où l’on pourrait s’attendre à avoir une société de clones tous identiques à l’individu « originel », nous trouvons une grande diversité physique, émotionnelle et mentale entre les Hoplotes. Un mécanisme se met en place dès leur naissance. Un brouillage génétique aléatoire. Pendant plusieurs cycles va s’opérer dans leur corps un grand charivari cellulaire. Les cellules se répliquent toutes en proposant systématiquement un panel de mutations. Un organe du cortex cérébral contrôle ces évolutions. C’est lui qui orchestre et choisit ce qu’il faut garder et ce qu’il faut rejeter. En moins d’un allongé le nouvel Hoplote est totalement différencié. C’est un être unique mais disposant de la totalité de la mémoire de ses ancêtres. De leur mémoire et donc de leur expérience.
C’est ainsi que, tout naturellement, se sont distinguées de grandes lignées d’Hoplotes spécialisées dans tel ou tel domaine d’expertises. Leur société est construite autour de métiers maîtrisés à l’excellence par des familles se transmettant et enrichissant leur savoir-faire de génération en génération.
Il arrive cependant que certains descendants soient “réinitialisés”. Ils naissent à l’identique de leurs parents mais n’héritent pas de leurs souvenirs. Ce sont des enfants au corps d’adulte. Ils sont appelés cancrènes et jouent un rôle primordial pour les Hoplotes. Ils sont le germe du renouveau et ne sont absolument pas considérés comme des anomalies. Ils reçoivent une instruction généraliste poussée. Ils apprennent l’histoire, la philosophie, l’économie, les sciences politiques et sociales. Fort de ce bagage universitaire ils sont ensuite invités à parcourir leur planète et à découvrir, rencontrer les grandes familles, échanger, discuter, instruire même parfois, mais surtout observer, voir et comprendre le monde qui les entoure. De cette connaissance ils doivent rendre compte. À intervalles réguliers, plusieurs fois par cycle, des assemblées réunissent des cancrènes et des personnalités Hoplotes représentatives des grandes familles. Y sont discutés tous les sujets de société. De l’amélioration de la fermentation de la levure de catcha aux précieuses unions entre les familles en passant par les programmes d’exploration des contrés encore inconnues d’Hoplos ou l’écriture d’un nouvel opéra relatant la fantastique histoire du cancrène inconnu.
En déléguant à cette instance les grands choix politiques et économiques, la société Hoplote s’assure stabilité, égalité et solidarité. Un texte unique commun à toutes les grandes familles, l’Otrole, sert de cadre, de garde-fou au travail des cancrènes.
Les Axes de l’Otrole
- Respect
- Jamais tu ne porteras préjudice, que ce soit physique ou moral, à ton prochain
- Jamais tu ne laisseras ton prochain dans l’indigence, la grande nécessité, la pauvreté.
- Tu apporteras à ton prochain les soins que tu connais et qui peuvent le guérir des maux du cœur, de l’esprit et du corps référencés dans l’Agra Médiculo Corpus
- Ton environnement naturel est notre cocon. Tu le protégeras, le défendras, l’entretiendras. Jamais tu n’y porteras atteinte, jamais tu ne le souilleras.
- Hospitalité
- Tu accueilleras l’étranger au sein de ton foyer. Tu pourvoiras à ses besoins. Tu veilleras à sa sécurité. Tu l’aideras à poursuivre ses objectifs. Tu tendras à maintenir le lien.
- Tu respecteras ton hôte. Tu veilleras à respecter l’intimité de sa maison. Tu tendras à l’accueillir en retour.
- Curiosité
- Dans ton domaine tu montreras du désir à découvrir, explorer, innover.
- Tu partageras ton savoir avec ton prochain. Tu transmettras et accueilleras le savoir d’autrui avec une saine avidité.
- De tes connaissances tu ne feras pas une source de pouvoir économique monopolistique ou la base d’une politique hégémonique.
Continuons notre réflexion sur ce que sont les lois, les principes de la société des Hoplotes. Nous avons vu qu’il y a trois familles, trois axes dans l’Otrole. L’Otrole qui peut être vu comme une constitution, une série de lois fondamentales.
Le non-respect de ces règles entraîne des peines allant de travaux d’intérêt général au bannissement. La stérilisation est également l’une des punitions utilisées pour les crimes particulièrement graves.
Figure 2 – Les Liens de l’Otrole
À partir de ces diktats les Hoplotes ont bâti une civilisation solide et juste, égalitaire et inclusive, ayant trouvé son équilibre entre la tradition et la modernité.
Les Hoplotes sont un peuple ami du Traceur. Ils ont trouvé chez les impériaux une énigme à la hauteur de leur insatiable curiosité. Nous interrogeons leur esprit analytique, nous attisons leur soif de savoir. Ils nous le rendent bien. Nous avons tant à apprendre de leur science, de leur art de l’hospitalité. Visiter un ami Hoplote est toujours une expérience inoubliable. Leur accueil vous change. Vous repartez avec quelque chose en plus. Des souvenirs, une histoire, un savoir, une amie, un sentiment, une recette, un projet, un objet, un remède, une relation. Quelque chose dans votre bagage que vous ne vous attendiez pas à ramener chez vous. Quelque chose de souvent doux, beau, réconfortant, chérissable.
Vous ne serez jamais que de passage chez les Hoplotes. Il est rare qu’ils permettent à un étranger de vivre sur Hoplos. Cela peut paraître contradictoire avec leur tradition de l’accueil mais c’est en fait aussi grâce à cela qu’ils peuvent recevoir le plus grand nombre tout en respectant les règles strictes de leur hospitalité.
Si vous passez sur Hoplos, allez voir Din Juin Alembic de ma part. Ils habitent la grande demeure familiale de l’Alanguille au sommet du Mont Inness, dans le nord du continent Urop. Dites que c’est Tacine qui vous envoie, il sera heureux de vous accueillir, j’en suis certain. Et profitez-en pour le remercier encore de ma part pour le merveilleux séjour qu’il m’a offert jadis dans le palais des récoltes. Par Judex, si vous voulez savoir ce que fruit et délice associés signifient vraiment, priez-le de vous y emmener aussi.